L’essai désigne une opération par laquelle on s’assure des qualités, des propriétés d’une chose ou de la manière de l’utiliser. Etant prévue initialement pour tester des choses, à quoi peut-elle servir en droit du travail ? La réponse à cette question fera l’objet d’un développement dans les lignes qui vont suivre à travers des rubriques qui porteront d’abord sur le but de la période d’essai pour les parties (1) ; ensuite sur les modalités de son exécution (2), une troisième rubrique sera consacrée à la rupture de la période d’essai (3), et enfin à une analyse critique du régime de la période d’essai et des propositions de solutions pour son amélioration seront énumérées (4).
1. le but de la période d’essai pour les parties
L’article 44 alinéa 1 du nouveau code togolais du travail (NCT) dispose que : « Tout contrat de travail peut comporter une période d’essai permettant à l’employeur d’évaluer les qualités professionnelles du travailleur, ou à ce dernier d’apprécier les conditions de travail, de vie, de rémunération, d’hygiène, de sécurité et santé au travail, ainsi que le climat social de l’entreprise ou de l’établissement ». Il ressort de cet article que la période d’essai concerne à la fois les contrats à durée déterminée que les contrats à durée indéterminée. Toutefois le législateur n’en fait pas une obligation. La loi dispose simplement que tout contrat de travail « peut » et non « doit » contenir une période d’essai.
- Du côté de l’employeur
L’essai est une période qui permet à l’employeur d’évaluer les capacités professionnelles du travailleur. Le Code du travail togolais ne définit pas la notion de qualités professionnelles. Cela montre le caractère subjectif de cette notion dont les critères de détermination dépendent de chaque employeur. Malgré tout, dans un essai de définition, les qualités professionnelles peuvent désigner : la capacité d’adaptation, la gestion du stress, le travail en équipe, l’autonomie, le sens de la communication, la rigueur, la curiosité, la persévérance, la réactivité, la capacité à prendre des décisions sans devoir être encadré, et la capacité à faire preuve d’objectivité au travail. Cependant la liste des qualités professionnelles recherchées par un employeur n’est pas exhaustive ; chaque employeur détermine les qualités professionnelles dont il a besoin pour faire grandir son entreprise.
- Du côté du travailleur
Toute personne à la recherche d’un travail ou qui aspire à changer d’environnement de travail, a forcément des exigences en matière de conditions de travail. Le Code du travail vient lui permettre d’éviter de travailler dans un environnement inadapté à sa personne. En effet la période d’essai permet au travailleur d’apprécier les conditions de travail, de vie, de rémunération, d’hygiène, de sécurité et de santé au travail, ainsi que le climat social de l’entreprise ou de l’établissement.
En définitive, la période d’essai profite aux deux parties (l’employeur et le travailleur) puisqu’elle leur permet d’analyser l’autre partie et de ne pas s’impliquer dans une relation vouée à l’échec.
- Les modalités d’exécutions de la période d’essai
- Le début de la période d’essai
Pour qu’une période d’essai commence, il faut d’abord qu’elle soit constatée par écrit dans un contrat de travail. En effet, l’article 44 al 2 NCT dispose que « la période d’essai est expressément stipulée par écrit au contrat et son éventuel renouvellement notifié pour une période identique ou inférieure ». Il résulte de l’interprétation de cet article qu’aucune des parties à un contrat de travail qui ne comporte pas de période d’essai ne peut se prévaloir de la période d’essai pour mettre fin au contrat et un éventuel renouvellement de la période d’essai ne peut être consentie pour une durée supérieure à la première période. La période d’essai débutera à compter du premier jour travaillé selon l’article 44 al 6 NCT et pour une durée bien précise.
- Durée de la période d’essaie
Avant tout développement sur cet aspect il est nécessaire de savoir que la période d’essai peut être prévue dans un contrat à durée indéterminée (CDI) comme dans un contrat à durée déterminée (CDD). En ce qui concerne la période d’essai pour les CDD, il s’agit d’une innovation de la loi N° 2021-012 portant Code du travail qui permet désormais, en son article 44 alinéa 4, aux employeurs de prévoir dans les CDD une clause d’essai dont la durée ne peut excéder un (01) mois peu importe la catégorie professionnelle du travailleur. Cette période d’essai n’est pas renouvelable.
En ce qui concerne les CDI ; la durée de la période d’essai varie. En effet, comme le dispose l’alinéa 5 de l’article 44 NCT, la durée de la période d’essai ne peut excéder
Huit (08) jours renouvelable une seule fois, pour les travailleurs payés à l’heure, soit une durée maximum de 16 jours renouvellement y compris.
Un (01) mois renouvelable une seule fois pour les ouvriers employés et personnes assimilées à des employés, soit une durée maximum de 2 mois renouvellement y compris.
Trois (03) mois renouvelable une seule fois pour les agents de maitrise, techniciens et personnes assimilées, soit une durée maximum de 06 mois renouvellement y compris.
Six (06) mois non renouvelable pour les cadres et personnes assimilées à des cadres.
- Les droits des parties pendant la période d’essai
La période d’essai est une période au cours de laquelle le travailleur va mettre ses capacités de travail à la disposition de l’employeur qui va se charger de lui donner du travail comme lors d’un contrat de travail normal. L’employeur comme le travailleur doivent bénéficier des mêmes avantages que s’ils se trouvaient dans une situation avec un contrat de travail définitif. En effet, l’article 44 al 7 NCT dispose que « La période d’essai est une période de travail effectif et ne comprend pas les délais de recrutement et de route ». De ce fait, l’employeur doit verser au travailleur la rémunération prévue par le contrat de travail dans lequel figure la période d’essai. C’est dans ce sens que va l’article 45 NCT dispose que : « La rémunération versée durant la période d’essai est celle fixée par le contrat de travail et conforme aux classifications professionnelles de la convention collective ou accord collectif en tenant lieu »
L’alinéa 8 de l’article 44 suit la même logique en précisant que « Les frais de voyage aller et retour du travailleur à l’essai, déplacé de sa résidence habituelle pour les besoins de l’employeur sont, dans tous les cas, à la charge de ce dernier ».
- La fin de la période d’essaie
A la fin de la période d’essai, il se présente deux situations pour les parties :
- 1ère situation : le travailleur n’est pas maintenu à la fin de la période d’essai
Dans ce cas les parties ne sont plus liées par le contrat.
- 2ème situation : le travailleur est maintenu à la fin de la période d’essai
Dans ce cas les parties sont définitivement liées par le contrat de travail pour la période pour laquelle il est signé.
Il existe une troisième situation : il s’agit du cas dans lequel au terme de période d’essai les parties ont gardé le silence quant au maintien du travailleur ou à son départ. Le Code du travail ne prévoit aucune disposition relative à cette situation. Il est tout de même possible que le silence de l’employeur soit analysé comme une volonté de continuer la collaboration avec le travailleur et de ce fait le travailleur pourra être considéré comme avoir été maintenue à la fin de la période d’essai.
La fin de la durée de la période d’essai n’est pas le seul moyen de mettre fin à la période d’essai. La loi prévoit aussi une rupture de la période d’essai à l’initiative des parties.
- La rupture de la période d’essai
Art.73 NCT « ‐ Sauf clauses particulières du contrat de travail ou des conventions collectives, la période d’essai prévue au contrat peut prendre fin à tout moment par la volonté de l’une ou l’autre des parties, sans motif ni indemnité, sous réserve du respect d’un délai de prévenance de quarante‐huit heures. Le non‐respect de ce délai de prévenance ouvre droit à une indemnité compensatrice égale au montant des salaires et avantages que le travailleur aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du délai de prévenance. L’indemnité n’est pas due en cas de faute grave ou faute lourde du travailleur ».
Il est possible pour chacune des parties de mettre fin unilatéralement à la période d’essai sans que cette période n’arrive à son terme, et sans donner de motif ni payer une indemnité à l’autre partie. Cependant, la loi fait obligation à la partie qui désire mettre fin à la période d’essai de donner un préavis de 48h au moins à l’autre partie. Il en résulte donc que si une partie ne respecte pas ce délai de préavis, elle s’expose au paiement d’une indemnité dont le montant est égal au montant des salaires et avantages que le travailleur aurait perçus s’il avait continué son travail jusqu’à l’expiration du délai de préavis (48h).
CAS PRATIQUE
La société work&pay spécialisé dans la vent de produit de première nécessité a engagé dans le cadre de l’expansion de ses activités un chargé de la communication et , un agent de maitrise et un cadre. La société vous donne les informations suivantes sur les contrats des trois salariés afin que vous ne fassiez une revue :
Le chargé de la communication bénéficie d’un CDD avec une période d’essai de 3 mois renouvelables. Le salaire à recevoir pendant la période d’essai est de 250 000 si il est maintenue à la fin de la période d’essai son salaire sera augmenter afin qu’il n’atteigne le salaire normalement prévu par le contrat de travail et conforme aux classifications professionnelles de la convention collective ou accord collectif soit 300 000 FCFA.
Agent de maitrise : bénéficie d’un CDI avec une période d’essai de 3 mois renouvelables, le salaire est conforme au salaire normalement prévu au contrat.
Cadre : bénéficie d’un CDI avec une période d’essai de 6 mois non renouvelable, un salaire de 500 000 conforme au salaire normalement prévu par le contrat de travail.
La période d’essai pour le contrat de l’agent de maitrise est presque arrivée à son terme, mais la société ne souhaite pas continuer la collaboration. Quelle est la procédure à suivre pour rompre la période d’essai ? la société devra-t-elle payer une indemnité au travailleur ?
La période d’essai du cadre assimilé est arrivée à son terme depuis deux semaines mais la société a garder le silence sur la continuité de la collaboration. La société peut-elle mettre fin à la collaboration aux motifs qu’elle n’avait pas confirmée la continuité du contrat de travail au terme de la période d’essai et qu’aucune clause du contrat ne précisait qu’en cas de silence à la fin de la période d’essai, le contrat devait être considéré comme définitivement considéré comme à durée indéterminée ?
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