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Rupture du contrat : cas de la rupture de la période d’essai

Principe : L’article 73 du code du travail prévoit la possibilité pour chacune des parties de mettre fin unilatéralement à la période d’essai sans donner de motif ni payer une indemnité à l’autre partie à condition pour la partie qui désire mettre fin à la période d’essai de donner un préavis de 48h au moins à l’autre partie.

Il en résulte donc que si une partie ne respecte pas ce délai de prévenance elle s’expose au paiement d’une indemnité dont le montant est égal au montant des salaires que le travailleur aurait perçu s’il avait continué son travail jusqu’à l’expiration du délai de 48h.

L’indemnité n’est pas due en cas de faute grave ou faute lourde du travailleur.

  1. Critiques et suggestions 
    1. Critiques

Même si d’un point de vue général l’existence de la période d’essai présente un avantage certains pour l’employeur comme pour le travailleur, son régime semble bien fragile car laissé à la merci des employeurs ou des travailleurs de mauvaise foi.

Deux causes sont à l’origine de la fragilité du régime de la période d’essai.

La première cause réside dans l’absence de définition de la notion de « qualité professionnelles ». En effet, cette notion n’a fait l’objet de définition ou d’énumération à aucun moment dans le Code du travail contrairement aux exigences du travailleur dans la période d’essai qui ont été bien précisé par le législateur (la période d’essai permet au travailleur d’apprécier les conditions de travail, de vie, de rémunération, d’hygiène, de sécurité et de santé au travail, ainsi que le climat social de l’entreprise ou de l’établissement). Cela s’avère problématique car, certes l’employeur doit avoir la liberté de déterminer les qualités qu’il recherche pour le développement de son entreprise mais cette liberté devrait être encadré par des orientations du législateur dans la mesure elle permettrait d’éviter tout abus de la part de l’employeur.

La deuxième cause réside dans l’absence de motifs réel et sérieux dans la rupture de la période d’essai ainsi que dans le refus de continuation du contrat à la fin de la période d’essai. Chacune des parties peut rompre la période d’essai sans motifs ni indemnités à condition de respecter un délai de préavis de 48h. A ce niveau on remarque l’absence de prise en compte de la perte de chance subi par l’autre partie au contrat. La rupture d’une période d’essai après cinq mois de travail ou le refus de continuation du contrat à la fin de la période d’essai sans raison valable serait injuste de la part de l’employeur ou du travailleur car elle aura occasionné une perte de chance pour l’autre partie qui doit reprendre le processus de recrutement ou de recherche d’emploi à zéro.

On entend par perte de chance du côté de l’employeur l’ensemble des potentiels candidatures qu’il aurait eues afin de pourvoir le poste objet de la période d’essai pendant la durée de cette dernière. Du côté du travailleur l’ensemble des offres, promotions, travail que la partie lésée par la rupture aurait pu avoir si elle n’était pas en essai avec l’autre partie, et qui aurait dû affecter sa nouvelle fonction. 

C’est le cas par exemple d’un cadre d’une société qui décide de quitter cette dernière pour une autre structure et qui voit sa période d’essai dans cette nouvelle société être rompu où déclarer non concluante sans motifs légitime. Ce cadre aura perdu son ancien poste ainsi que les éventuelles promotions auxquelles il aurait pu prétendre, et les éventuelles opportunités qui se seraient présentées à lui autre part pendant la période d’essai.

  1. Suggestions

Nos suggestions s’étendent sur deux volets à savoir la mise en place de dispositions préventive à l’abus de liberté laissé en matière de période d’essai et la mise en place de disposition curatives afin de sanctionner les abus.

Dispositions préventives : Essai de définition de la notion de qualité professionnelles

Un essai de définition aurait permis de mieux encadrer les contours de la période d’essai.  La notion de qualité professionnelle doit être défini par le législateur en tenant compte de critères objectif tel que :

  • La capacité sociale (capacité à travailler en équipe ou sous ordre etc)
  • Les qualités nécessaires à un employé pour pouvoir exercer dans le secteur d’activités concerné par son poste.

Une autre alternative est possible. Il s’agit pour le législateur d’exiger l’énumération, par l’employeur, des différentes qualités professionnelles qu’il juge utiles pour le poste qu’il offre. Cela permettra à l’autre partie à la période d’essai de savoir sur quel aspect elle sera évalué, et d’éviter les ruptures sans motifs.

La révision des modalités de rupture et de non continuation de la période d’essai en les soumettant à des justifications par des motifs réels et sérieux à charge pour la partie qui souhaite ne plus continuer d’en apporter la preuve.

Cela permettra d’éviter de léser les cocontractants de bonne foi à travers la mise en place de garde-fou pour les protéger. 

Disposition curatives :

  • La mise en place d’une indemnité de perte de chance au profit de la partie lésée en cas de rupture avec motif réels et sérieux ; 
  • Le cumul de l’indemnité de perte de chance à une indemnité de temps perdu en cas de rupture abusive ;
  • La Détermination de modalités de calcul des deux types d’indemnité ;
  • L’Attribution d’un rôle prépondérant au juge dans le cadre de la vérification des circonstances de rupture de la période d’essai ainsi que dans le calcul des indemnités ;
  • Le juge doit s’assurer que la finalité de la période d’essai n’a pas été détournée surtout par l’employeur, car en raison des conjonctures, certains employeurs peuvent s’accorder plus de souplesse dans la gestion de leur personnel.

Alternative aux risque de rupture abusive de la période d’essai :

L’article 73 alinéa 1 du Code du travail dispose : « Sauf clauses particulières du contrat de travail ou des conventions collectives, la période d’essai prévue au contrat peut prendre fin à tout moment par la volonté de l’une ou l’autre des parties, sans motif ni indemnité, sous réserve du respect d’un délai de prévenance de quarante‐huit heures ». Cet article laisse une place à la liberté contractuelle en utilisant l’expression « sauf clauses particulières du contrat de travail ». La partie qui souhaite ne pas être victime d’une rupture abusive peut donc exiger qu’une clause du contrat prévoit une rupture avec motif réel et sérieux ainsi qu’une indemnité de rupture ou un délais de préavis plus long.

Ikhlaas ADJITA

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